C’est une phrase passée presque inaperçue, au fin fond d’un article de Libération, qui en dit long sur la manière dont le parti d’Emmanuel Macron conçoit la démocratie. Elle a été repérée par les Économistes atterrées, qui l’ont signalé dans un tweet. Un « candidat [En Marche] en ballotage très favorable près de Paris », probablement élu député depuis, expliquait :
« Il faudra trouver un moyen de scénariser une pluralité de tendances entre nous [à l’Assemblée nationale] pour qu’il y ait un semblant de débat »
Et il ajoutait, lucide :
« Il ne faudrait pas que le seul débouché pour les idées soit la rue. »
Une stratégie qui, si elle n’est pas assumée pleinement publiquement (et on comprend pourquoi !), est tout de même apparemment sérieusement préparée, puisque Mounir Mhjoubi, secrétaire d’Etat chargé du Numérique et proche d’Emmanuel Macron, explique dans le même article :
« Vous allez avoir des gens qui vont débattre [au sein d’En Marche] qui ne seront pas toujours d’accord… »
En Marche se prépare donc clairement à duper les citoyen•ne•s en feignant des divisions au sein de la majorité pour qu’il y ait – ce sont leurs mots – un « semblant de débat ». L’objectif est clairement assumé : éviter que la contestation de la politique du président Macron prenne une forme populaire de masse en se structurant dans « la rue ». Cela serait en effet d’autant plus dangereux pour le pouvoir en place que Jean-Luc Mélenchon et les député•e•s insoumis•es ont déjà indiqué leur volonté de faire le lien entre le groupe qu’ils vont constituer à l’Assemblée nationale et le mouvement qui se prépare déjà contre les mesures antisociales et antidémocratiques de la majorité.
Une fois de plus, le parti d’Emmanuel Macron donne donc la preuve de son mépris pour l’intelligence du peuple. Sans doute ses député•e•s croient-ils et elles pouvoir abuser les gens en feignant d’être opposé•e•s à tel ou tel point d’une loi pour que nous nous avalions le reste de la potion amère. Pour prendre un exemple schématique, quand le gouvernement proposera les 40 heures de travail par semaine et le retour des coups de fouets pour « booster la compétitivité de la start-up France », quelques député•e•s de la majorité pourront pousser de grands cris en disant que, vraiment, les coups de fouet, ça va trop loin, et qu’il vaut mieux pousser à 42 heures par semaine plutôt que de s’abaisser à de la violence physique sur les salariés. Et, ainsi, des reculs sociaux majeurs pourraient ensuite être présentés (avec la complicité de certains médiacrates) comme de véritables victoires des « frondeurs d’En Marche » qui ont « tempéré la volonté de réforme et de modernisations de l’économie » du gouvernement.
Mesdames et messieurs les député•e•s macronnistes, sachez que votre petit jeu de poker menteur ne marchera pas avec nous. Nous en avons assez soupé dans la mandature précédente. Nous constituerons une opposition populaire de masse à l’Assemblée ET dans la rue contre toutes les mesures antisociales, antidémocratiques et antiécologiques prévue par le gouvernement. Et cette opposition ne sera pas feinte : elle sera combative et instructive, car nous porterons publiquement les reculs majeurs posés par le programme du président Macron. Comme l’a parfaitement expliqué Jean-Luc Mélenchon au soir du second tour des élections législatives : « pas un mètre du terrain du droit social ne sera cédé sans lutte ». Tenez-vous le pour dit.