Marine Le Pen était satisfaite ce lundi 7 octobre à l’Assemblée nationale. Il faut dire que le président de la République lui offrait sur un plateau le sujet qu’elle aime tant : l’immigration. Emmanuel Macron avait en effet décidé que les députés n’avaient rien de mieux à faire ce jour-là que de débattre de ce thème. Avec un objectif que tout le monde comprend : faire monter le Rassemblement national pour construire en 2022 un paysage politique dans lequel les citoyens seraient contraints au même choix qu’au deuxième tour de 2017 : Le Pen ou Macron ? Autant dire : « la peste ou le choléra ? ».
Le Pen blablate sans rien proposer
La présidente du Rassemblement national a, comme on pouvait s’y attendre, bondi sur l’occasion pour répéter les mêmes poncifs servis par l’intégralité de la famille depuis 40 ans. Allant jusqu’à parler de « submersion » migratoire. Un terme mal choisi quand on sait que la « submersion » est d’abord celle des migrants eux-mêmes, engloutis dans les eaux de la Méditerranée. Plus de 35 000 y sont morts ces 15 dernières années. Un drame humain qui mérite d’être réglé, pas d’être exploité électoralement.
Mais la misère humaine est pour Marine Le Pen un fond de commerce. Enchaînant les phrases destinées à attiser la peur, elle n’a cependant proposé aucune solution pour traiter réellement la question de l’immigration, renvoyant simplement à « un plan d’action construit et rédigé » du Rassemblement national dont elle n’a donné aucune proposition. Autrement dit : l’immigration lui est utile pour faire peur et pour faire voter pour elle, mais elle n’a pas grand chose de concret à proposer sur le sujet. Du moins ce n’est pas ce qu’elle a mis en avant dans son discours à l’Assemblée.
Mélenchon dénonce la stratégie macroniste : épargner les riches en divisant le peuple
Bien différent, on s’en doute, était le discours de Jean-Luc Mélenchon. Le tribun de la France insoumise a pour sa part commencé par dénoncer le choix de la macronie de servir ainsi la soupe à Marine Le Pen en amenant, de nouveau, ce thème devant l’Assemblée nationale. Il a ainsi expliqué : « Comment osez-vous dire que notre pays a été privé de discussion sur le sujet ! La famille Le Pen en fait son programme électoral depuis 40 ans ! Et ça fait quarante ans que les mêmes arguments sont sur la table ! 40 ans que l’on fait les mêmes répliques. (…) En réalité nous sommes convoqués pour fournir le décor d’une nouvelle opération de propagande dans votre campagne électorale permanente. »
Jean-Luc Mélenchon a ensuite pointé du doigt l’objectif visé par les macronistes : épargner les riches en divisant le peuple. Il a ainsi expliqué : « Vous avez choisi de faire, de nouveau, de l’immigré la figure du bouc-émissaire des problèmes du pays. L’immigré plutôt que le financier qui pille notre pays, l’immigré plutôt que fraudeur du fisc qui vole chaque année 80 à 100 milliards au pays. L’immigré plutôt que les corrompus qui ont bradé l’industrie du pays à l’étranger. Oui parce que quand les riches et les puissants fuient l’impôt, ils le font en comparant les régimes fiscaux pour profiter de notre pays sans prendre leur part d’effort à son existence. Alors ils se figurent que les pauvres en font autant en comparant les régimes sociaux. Avec vous, les étrangers sont adulés s’ils viennent faire des affaires ; ils sont montrés du doigt s’ils viennent en produire par leur travail. Le pays mérite mieux. »
Contrairement aux autres, Mélenchon fait des propositions pour régler les causes du départ
Mais le tribun de la France insoumise ne s’est pas contenté de cela. Il a en outre produit dans son discours une analyse des causes de l’immigration. Ou plus exactement de l’émigration, c’est à dire des raisons pour lesquelles les gens quittent leur pays d’origine. Il a expliqué : « L’immigration est un phénomène en voie d’expansion dans le monde. D’abord du fait des ravages des politiques libérales qui dévastent les économies de tant de pays. Et notamment du fait de l’Europe qui a soumis 32 pays africains à des accords de partenariat économique ruineux pour eux. Ensuite du fait des guerres que ces violences économiques déclenchent. Enfin, désormais, du fait du changement climatique qui va mettre près d’un milliard de personnes sur les routes de la fuite. »
Face à cette situation, Jean-Luc Mélenchon a proposé des solutions claires, appelant à sortir du libéralisme : « les gens doivent pouvoir rester chez eux. “Vivre et travailler au pays” disait-on il y a trente ans de cela quand on refusait les migrations entre régions françaises. Il faut relocaliser les productions. Il faut avoir un bon usage des frontières. Les marchandises et les capitaux doivent circuler moins librement pour que les gens ne soient pas forcés d’entrer dans leur danse ». Des propositions simples et claires dont Le Pen s’est avérée incapable. Et pour cause : le libéralisme économique lui convient parfaitement ; mais sans en sortir, impossible de s’attaquer aux causes des départs.
Mélenchon : « Il faut aimer la France », c’est à dire la République
Jean-Luc Mélenchon a conclu son discours en faisant une fois de plus la démonstration de ses talents oratoires, dans un appel à aimer la France pour ce qu’elle est : une République dans laquelle la nation n’a pas de définition ethnique mais une définition politique. Il a ainsi expliqué : « Il faut aimer la France. Il faut savoir qui elle est pour comprendre tout ce qu’elle peut faire. Avec le droit du sol, le peuple français peut faire France de tout bois. Nous sommes une nation républicaine c’est-à-dire que notre devise peut s’appliquer à tout être humain quelle que soit sa culture ou son ethnie de départ. Nous sommes donc une nation universaliste. Ou bien nous ne sommes plus la France ».
Il a ensuite poursuivi : « La réponse aux problèmes que soulève inévitablement toute immigration grande ou petite tient en peu de mots : nous n’avons pas besoin de nouveaux camps de rétention ni de nouvelles règles et de lois. Nous avons besoin de davantage de professeur des écoles, davantage de formation professionnelle, davantage de logements de qualité, davantage de travail à se répartir. Nous avons besoin de milliers de bras et de têtes au travail bien préparées pour réaliser la transition écologique de l’agriculture et l’industrie. Et pour affronter les conséquences du changement climatique désormais engagé ! »
Mélenchon : « La France est à tous ceux qui la font vivre et qui l’aiment »
Bref, comme l’a dit Jean-Luc Mélenchon dans son discours, « La France mérite mieux » que des débats stériles qui utilisent l’immigration pour faire peur. Il l’a affirmé en achevant son intervention par ces mots : « J’appelle les millions de bi-nationaux et les enfants de ces longues et belles histoires de vie commencée ailleurs, ceux de la première ou deuxième génération, à s’exprimer pour dire qu’ils en on assez d’être traités comme de la chair à canon électorale. La France est notre patrie républicaine commune. Elle est le lieu de notre avenir en commun. Elle est a tous ceux qui la font vivre et qui l’aiment. »
Puisse cet appel être largement entendu.
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