Qu’arrive-t-il au Journal du Dimanche, le JDD ? Depuis plusieurs semaines, l’organe de presse semble s’être transformé en organe central de la propagande macroniste. Il le fait depuis des mois en relayant, avec une complaisance certaine, la politique du gouvernement, si favorable à son patron, le milliardaire Arnaud Lagardère. Il le fait aussi en critiquant constamment le mouvement des gilets jaunes, dont le mot d’ordre « Macron démission » fait trembler ceux qui ne veulent pas voir revenir l’ISF. Ainsi, le 2 décembre, le JDD titrait « Gilets jaunes : l’appel des modérés », inventant des porte-paroles que le mouvement ne reconnaît pas comme les siens. Puis, le 9 décembre, le JDD titrait : « Gilets jaunes : qui va payer ? ». Ironie : ce journal n’a pas posé la même question pour la suppression de l’ISF ou le doublement du coût du CICE pour l’année 2019.
Mais cette semaine, le JDD franchit un nouveau cap en embrayant directement sur la nouvelle stratégie des macronistes : faire passer Le Pen pour plus républicaine que Mélenchon et rejeter le second hors du champ républicain. Si bien qu’on a désormais du mal à faire la différence entre les propos du porte-parole du gouvernement Benjamin Griveaux et le rédacteur en chef du JDD Hervé Gattegno. Le premier avait déclaré « Mélenchon a quitté le champ républicain » le 7 janvier 2019 ; le second écrit dans son édito du 13 janvier : « Jusqu’où Mélenchon et les siens, souvent gagnés par l’outrance, peuvent-ils dériver ? », en évoquant une prétendue possibilité de rapprochement entre Le Pen et Mélenchon qui n’existe que dans la tête des éditorialistes ; quelques heures plus tard, Griveaux tweete : « Quand vous entendez les mots employés par certains dirigeants du Rassemblement national et de la France insoumise, une convergence troublante existe. Ce sont des démocrates hésitants. ». Comment faire pour différencier encore des propos aussi similaires ? Le JDD, c’est la voix de Macron ; Macron c’est la voix du JDD.
Le JDD parle de Mélenchon comme il parle des gilets jaunes
L’édition du 13 janvier du JDD apparaît ainsi comme un cas parfait de propagande macroniste. Après avoir tapé sur les gilets jaunes, le journal tape sur celui qui est le plus proche de leurs revendications sociales et démocratiques : Mélenchon. À la une s’étale une photo inquiétante du leader de la France insoumise sur un fond noir tout aussi inquiétant. Et le titre donne la légende : « Mélenchon, la dérive qui inquiète ». Quelle dérive ? Il n’y en a pas. Juste un soutien indéfectible de sa part aux gilets jaunes, face à l’oligarchie politique et médiatique coalisée contre ceux qui défendent simplement le droit à vivre dignement de leur travail.
Deux sous-titres complètent le dispositif : « Populisme – ses outrances, ses calculs, ses ambiguïtés » et « Convergence – Insoumis et lepénistes : ce qui les rapproche ». Bref : le JDD parle de Mélenchon comme il parle des gilets jaunes. Ironie du sort : le sondage publié par le JDD pour taper sur Mélenchon produit l’effet inverse quand on le compare avec un sondage du même institut posant les mêmes questions les 23 et 24 octobre dernier. Y compris sur la question de « l’inquiétude »… pourtant utilisée à la « une » du journal.
Les chiffres que le JDD a cachés. pic.twitter.com/jaCUe8g9EL
— Jean-Luc Mélenchon (@JLMelenchon) 13 janvier 2019
Tout le dossier à l’intérieur du journal a pour unique objectif de développer la thèse suivant laquelle Jean-Luc Mélenchon et Marine Le Pen pourraient effectuer un rapprochement. Que l’un comme l’autre dise ce rapprochement impossible n’embarrasse pas le JDD. Que leurs programmes soient opposés sur les questions démocratiques, sociales et écologiques n’embarrasse pas non plus le JDD. Que le sondage publié par ce même journal, dans cette même édition, dise exactement le contraire n’embarrasse toujours pas le JDD : 79% des Français jugent en effet improbable une alliance entre Le Pen et Mélenchon. Mais le JDD s’en fout : il est là pour faire de la propagande macroniste, pas de l’information.
On ne peut donc plus, désormais, considérer le JDD comme un outil d’information. Il est simplement devenu une succursale du dispositif de communication d’Emmanuel Macron. Mais comment pourrait-il en être autrement quand ce journal invite Benalla, Ferrand, Darmanin, Sarkozy, et compagnie pour fêter ses 70 ans d’existence ? Comment pourrait-il en être autrement quand le président de la République mène une politique si favorable aux ultra-riches et donc au patron multi-milliardaire de ce journal ? Comment pourrait-il en être autrement quand un média est à ce point lié aux intérêts politiques et financiers ? Comment pourrait-il en être autrement quand un média touche plus d’un million d’euros d’aides publiques de l’État pour faire sa misérable besogne de critique des gilets jaunes et de tentative d’affaiblissement de l’opposant n°1 à Macron ?
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