En effet celle-ci était composée de combattants venus de l’hexagone et d’Afrique, particulièrement d’Afrique du Nord. La majorité d’entre eux n’avaient jamais posé le pied sur le sol métropolitain et beaucoup d’entre eux n’avaient d’ailleurs même pas la nationalité française. Et pourtant, ils se battaient tous pour la France et, dans cette guerre, pour faire triompher les idées de la Révolution et de la République face au nazisme qui en était l’antithèse.
Une gerbe de rameaux d’oliviers, symbole de paix, a été déposée sur le monument au mort par les membres du collectif.
Voici le texte de ce discours :
Chers citoyennes, chers citoyens,
Nous sommes réunis aujourd’hui pour honorer la mémoire des combattants de la Libération de Marseille et Nice, survenue il y a 75 ans, le 28 août 1944.
On peut s’interroger. Que font des Indriens un 28 août 2019, sous la chaleur d’un soleil qui n’a rien à envier à celui qui flotte généralement sur les villes dont nous fêtons aujourd’hui la Libération ?
Parce que par la Libération de ces deux villes, nous célébrons un événement qui est un tournant, pour la France, dans la Seconde Guerre Mondiale.
La Libération de Marseille et Nice, marque le milieu du « débarquement de Provence », commencé le 15 août 1944 et achevé le 11 septembre 1944 par la jonction avec les troupes qui ont débarqué en juin en Normandie.
Ce 28 août, c’est la deuxième ville de France, Marseille, qui est libérée de l’occupation allemande. Le 25 c’était Paris, la capitale. Le 26 c’était Toulon et son port. Le 3 septembre, ce sera Lyon.
La Libération de Marseille est un tournant psychologique. C’est le moment où chacun se dit que désormais, la Libération de la France toute entière n’est plus qu’une question de temps. D’ailleurs, la Libération de Nice, qui survient le même jour, est le fait des Résistants qui déclenchent l’insurrection armée devant l’avancée fulgurante des soldats de la Libération.
Si nous sommes ici aujourd’hui c’est parce que le débarquement de Provence, par la composition de l’armée victorieuse, mêlant les nationalités, les couleurs de peau, les cultures, les croyances, le colon et le colonisé dans l’égalité du front, montre l’universalité des principes proclamés par la Révolution et la République.
Il faut célébrer cette bataille car elle dit beaucoup de choses de la France. De belles et de moins belles.
Commençons par le beau.
Il y a d’abord le combat lui-même. Car l’ennemi qu’on affronte, c’est le nazisme. En débarquant sur le territoire métropolitain, ce sont les adversaires les plus résolus de l’idéal porté, depuis la Révolution, par la République française, que nous combattons. Le nazisme qui a pensé et mis en œuvre la solution finale, consistant à mettre le progrès technique au service du meurtre de masse des Juifs, Tziganes, handicapés, homosexuels. De tous ceux qui, pour ce qu’ils étaient, étaient considérés comme n’étant pas dignes de rester en vie.
Le racisme hitlérien est la négation ultime de ce que les révolutionnaires français ont affirmé pour le monde : tous les êtres humains, absolument tous, sont égaux. Absolument égaux.
En ce sens, les Sénégalais, les Français, les Tunisiens, les Marocains, les Algériens qui débarquent sur les plages de Provence le 15 août 1944 sont les héritiers des soldats de Valmy qui, le 20 septembre 1792, triomphèrent des tyrans qui s’étaient coalisés contre la Révolution française. C’est de ce combat victorieux qu’était née, le lendemain, la Ière République.
Cette république révolutionnaire, il faut la juger à l’aune de ses réalisations et de la mise en œuvre de ses principes. Après la déclaration des droits de l’homme et du citoyen, le 26 août 1789 qui affirme que « les hommes naissent et demeurent libres et égaux en droits », elle a permis, le 27 septembre 1791, l’accès à la citoyenneté française aux Juifs. Moins d’un an plus tard, le 4 avril 1792 l’accès à la citoyenneté est également accordé aux « hommes de couleur libres ». Un an et demi plus tard, le 24 septembre 1793, Jean-Baptiste Belley est élu membre de la Convention nationale et devient ainsi le premier député noir de notre pays. Moins d’un an plus tard encore, le 4 février 1794, l’esclavage est aboli sur l’intégralité du territoire français.
Et dans la Constitution du 24 juin 1793 qui fonde la Ière République, voici comment est décrit ce qu’on appellerait aujourd’hui l’accès à la nationalité : « Tout homme né et domicilié en France, âgé de vingt et un ans accomplis ; – Tout étranger âgé de vingt et un ans accomplis, qui, domicilié en France depuis une année – Y vit de son travail – Ou acquiert une propriété – Ou épouse une Française – Ou adopte un enfant – Ou nourrit un vieillard ; – Tout étranger enfin, qui sera jugé par le Corps législatif avoir bien mérité de l’humanité – Est admis à l’exercice des Droits de citoyen français. »
Alors bien sûr, l’oeuvre de la Révolution souffre d’un manque terrible puisqu’elle a laissé dans l’oppression la moitié de l’humanité : les femmes. Ce n’est pas elle qui leur fait accéder aux droits civiques, au statut de citoyennes. Cela ne sera acquis, justement, que par la Libération que nous célébrons aujourd’hui.
Mais tout de même. Comment ne pas se dire, deux siècles plus tard, que nos ancêtres étaient plus humanistes que beaucoup de nos contemporains aujourd’hui ? Comment ne pas admirer ces Français d’hier alors qu’aujourd’hui nous laissons mourir de faim, de froid ou de soif 2000 personnes dans la rue par an ? Que notre Etat, laisse périr en mer et en montagne tous ces pauvres gens qui tentent de rejoindre le sol du « pays des droits de l’Homme » ?
Mais je reviens aux raisons pour lesquelles, au milieu d’un hommage aux combattants de 1944, je me suis mis à vous parler de la Révolution et de ses principes.
Je l’ai fait parce que je vous parlais de l’ennemi que nous combattions et pour monter combien le nazisme était l’antithèse de la France républicaine et révolutionnaire.
Je l’ai fait pour signaler combien était impardonnable la faute des chefs à la ramasse qui, ont préféré, en juin1940, pactiser avec Hitler et trahir ainsi tout ce qui fait la France.
J’ai dit que le débarquement de Provence disait beaucoup de choses de la France et que je commençais par les belles choses. Je continue.
Car ce sont les armées de la France qui ont débarqué en Provence. Les armées de la France libre, c’est à dire de la seule version de la France qui puisse exister.
Mais il a fallu, pour qu’elle puisse exister, le courage de celles et ceux qui, sur le territoire occupé par l’ennemi ou bien à l’extérieur de celui-ci, ont compris dès le 17 juin et le discours de Pétain appelant à cesser le combat, qu’il fallait au contraire le continuer partout où cela était possible.
Parmi ces hommes, il y en a un, bien sûr, qui sort du lot. C’est le général de Gaulle. Par son appel du 18 juin 1940, il incite à continuer le combat et prononce ces mots prophétiques : « Le dernier mot est-il dit ? L’espérance doit-elle disparaître ? La défaite est-elle définitive ? Non ! Quoi qu’il arrive, la Flamme de la résistance française ne doit pas s’éteindre et ne s’éteindra pas. »
Et la flamme tient bon. Quatre ans plus tard, le 15 août 1944, ce sont bien les armées de la France qui forment le gros des troupes. Sur les 350 000 hommes qui débarquent en Provence, 230 000 d’entre eux portent l’uniforme français : une écrasante majorité. Et c’est pourquoi, dans son discours du 25 août 1944 ,qui fait suite à la Libération de Paris, le général de Gaulle dit ces mots :
« La France rentre à Paris, chez elle. Elle y rentre sanglante, mais bien résolue. Elle y rentre, éclairée par l’immense leçon, mais plus certaine que jamais, de ses devoirs et de ses droits. Je dis d’abord de ses devoirs, et je les résumerai tous en disant que, pour le moment, il s’agit de devoirs de guerre. L’ennemi chancelle mais il n’est pas encore battu. (…) Nous voulons entrer sur son territoire comme il se doit, en vainqueurs. C’est pour cela que l’avant-garde française est entrée à Paris à coups de canon. C’est pour cela que la grande armée française d’Italie a débarqué dans le Midi ! et remonte rapidement la vallée du Rhône. »
Jusque dans ce célèbre discours « Paris outragé », de Gaulle évoque donc cette « armée d’Italie » qui sera rapidement renommée la « Ière armée ». Il faut dire que c’est encore une fois sa ténacité qui a permis qu’ait finalement lieu le débarquement de Provence contre l’avis de Churchill qui voulait que les forces françaises soient utilisées en Europe de l’Est pour remonter à Berlin avant les Russes.
C’est le moment de vous en dire plus sur cette armée et sur ces combattants auxquels nous rendons hommage aujourd’hui.
Car la Ière armée n’est pas n’importe quelle armée. Elle est composée, je l’ai dit, d’environ 230 000. Parmi eux, 15 000 soldats de la France libre venus de l’hexagone, 10 000 soldats des troupes coloniales d’Afrique noire et 200 000 venant d’Algérie, de Tunisie et du Maroc. 48% de ces derniers étaient ce qu’on appelle des « Pieds-noirs », c’est à dire des Européens nés au Maghreb. Les 52% restants, soit la majorité, étaient ce qu’on appelait à l’époque des « musulmans » – comprenez des Marocains, Algériens et Tunisiens.
L’essentiel des hommes qui ont débarqué en Provence en 1944 pour se battre contre les nazis n’avaient jamais posé le pied sur le sol hexagonal. Beaucoup, d’ailleurs – sinon la majorité – n’avaient pas la nationalité française. Car même dans les départements d’Algérie subsistait le honteux « statut des indigènes d’Algérie » qui établissait une distinction au niveau de la citoyenneté entre les personnes nées en Algérie de parents Algériens et ceux nées en Algérie de parents Français, en contradiction totale avec les principes de la Révolution et de la République.
Et pourtant. Tous se battaient, côte à côte et en frères d’armes, pour la France. Et tous recevaient sur le sol hexagonal l’accueil chaleureux qu’on donne aux libérateurs. Il faut se rendre compte à quel point le fait de partager un tel ennemi, et de lui infliger une telle défaite est apparu alors comme la preuve même de l’unité du genre humain.
Mais vous le savez, j’ai dit que le débarquement de Provence disait beaucoup de choses de la France, de belles comme de moins belles.
Vient le moment de parler des moins belles.
Il y a d’abord cet acte si contraire à l’idéal humaniste de la République et de la Révolution qu’on a appelé le « blanchiment » de l’armée. En effet, à mesure que continuent les combats en remontant vers le Nord et l’Est, les soldats dit « de couleur » sont peu à peu remplacés par des soldats « blancs » issus des FFI.
Bien sûr, on parle du froid et des conditions climatiques de l’hiver 1944 qui seraient difficiles à supporter pour les soldats d’Afrique. Mais il y a aussi une volonté d’impliquer les jeunes Français dans la Libération et aussi une inquiétude grandissante concernant l’influence des idées propagées par les Résistants communistes sur les troupes africaines (notamment concernant la question de l’émancipation des peuples et de la décolonisation).
C’est la tragédie des chefs, des puissants. Pour eux, il ne fallait pas que l’expérience partagée du combat contre le nazisme efface les haines, les peurs, le sentiment de domination entre ces gens qui avaient fait troupe commune. Parce qu’alors on aurait réalisé l’absurdité de la colonisation. Trop de fortunes, trop d’intérêts dépendaient de l’impérialisme européen pour que cela fût permis. On ordonna donc ce « blanchiment ».
Les Etats-Unis ont particulièrement veillé à ce qu’une armée aussi bigarrée ne remonte pas trop au nord. Car chez eux aussi, une grande partie de l’élite profitait de l’état de pauvreté générale dans lequel étaient laissés les noirs. Ils profitaient de la ségrégation, c’est-à-dire la privation des droits civiques, dans les Etats du sud.
Ainsi, les états-majors empêchèrent en quelque sorte la victoire contre le nazisme d’aller à son aboutissement logique : la réalisation effective de l’égalité entre les êtres humains. Cette finalité est pourtant celle à laquelle poussaient les héros de la Résistance, ceux qui ont tenu le maquis pendant quatre ans, et les vainqueurs du débarquement de Provence. Mais déjà, à cette époque, le racisme est un moyen pour les dominants de garder le pouvoir en divisant le peuple. Cela n’a pas changé.
De l’autre côté de l’Atlantique, après la guerre, les noirs ont pris au sérieux les principes du combat contre le nazisme. Dans les décennies qui ont suivi, ils ont ont conquis de haute lutte leurs droits civiques. L’écrivaine Toni Morrison, figure de cette lutte, récemment décédée, disait : « la fonction très grave du racisme est la distraction : il vous empêche de faire votre travail ».
Elle a raison. En 1944, il aurait été impossible, avec des principes racistes, de constituer l’armée qui a libéré la France. Aujourd’hui, comment apporter du crédit à ces thèses stupides alors que la catastrophe climatique nous met tous à égalité devant ce nouveau péril mortel ? Les divisions, les discriminations, nous empêchent d’accomplir la tâche vitale de notre siècle.
Mais je reviens à la question coloniale. Elle est la cause d’une autre injustice pour ces soldats étrangers : l’inégalité des pensions entre les anciens combattants en fonction de la nationalité et du pays de résidence. Elle perdura jusqu’en 2010 ! Combien sont morts, entre temps, dans l’injustice alors qu’ils avaient libéré la France ?
Si nous avons choisi de réaliser cet hommage aujourd’hui, c’est pour rendre justice, à notre échelle et à notre mesure, à tous ces combattants de la Liberté.
Nous n’oublions pas que c’est cette guerre, ce débarquement, puis les nécessités de la reconstruction de notre pays après la barbarie nazie, qui font qu’aujourd’hui vivent sur notre sol beaucoup de Français d’origine africaine et maghrébine. Ils sont les descendants de ceux qui ont mené combats et constructions au service de la France. Leurs parents sont des héros. Où sont alors les rues qui portent leurs noms, les monuments qui célèbrent leur sacrifice ? Où sont-ils et d’abord ici, à Châteauroux ? Se souvenir sans discriminations de tous ceux qui ont rendu sa liberté à la France, c’est permettre, demain, la construction d’une République qui incluse enfin tous ses enfants.
Aujourd’hui, et contre les grands principes que nous a légués la grande Révolution de 1789, ils subissent souvent le racisme. On a pu de nouveau en voir un exemple lorsque l’Algérie a gagné la Coupe d’Afrique des Nations et que des drapeaux verts et blancs ont fleuri dans nos rues, brandis par ceux qui gardent encore un lien fort avec le pays qui a vu naître leurs parents et, le plus souvent, leur grands-parents et arrières-grands-parents. Combien d’absurdes commentaires racistes a-t-on alors entendu ?
Car si l’on voit fleurir ces drapeaux c’est parce que depuis la Seconde Guerre Mondiale, l’Algérie a cessé d’être les trois départements français d’Oran, Alger, Constantine pour devenir un pays indépendant en 1962. Et si l’on voit, en d’autres occasions, des drapeaux marocains, tunisiens et plus largement africains, c’est pour les mêmes raisons : la France a cessé – et c’est heureux – d’être pour ces pays la puissance coloniale qu’elle était.
Existe-t-il pour autant un problème avec ces drapeaux ? Non. En bien des occasions footballistiques, et la dernière en date est la coupe du monde de 2018, les mêmes qui brandissent des drapeaux étrangers brandissent le drapeau tricolore. Parce que leur identité est bien plus complexe que ce à quoi certains, qui oublient les principes de la Révolution et de la République, voudraient les réduire. On peut aimer le pays dont sont originaires ses anciens et aimer la France.
On peut tenir à la main, et avec fierté, un drapeau tricolore pour la victoire de la coupe du monde en 2018 et, avec la même fierté, tenir un drapeau algérien pour la victoire de 2019. On le tient d’autant plus avec fierté que cette même année, l’Algérie est entrée dans un processus de révolution citoyenne qui fait écho aux grands principes de la Révolution française de 1789.
On me dira que je m’éloigne du sujet de l’hommage d’aujourd’hui. Au contraire, je suis en plein dedans. Car l’Histoire du débarquement de Provence a été passée sous silence pendant des années. Et pourtant, parmi les combattants qui venaient du Maghreb, beaucoup combattaient pour Libérer la France, tout en pensant qu’ensuite viendrait le temps de l’indépendance. Qu’en quelque sorte le combat pour la Liberté, l’Egalité et la Fraternité mènerait rapidement à ce que ces principes s’appliquent aussi dans la relation entre la France et l’Afrique qu’elle colonisait. Il a malheureusement fallu plus de temps que ce que beaucoup espéraient et, dans le cas de l’Algérie, une guerre dont les traces douloureuses perdurent encore aujourd’hui.
Mais c’est précisément pourquoi nous avons voulu venir ici rendre hommage aux combattants du débarquement de Provence et de la Libération. À tous les combattants : Français et non Français. Combattants venus de l’extérieur et combattants de l’Intérieur. Nous sommes venus ici pour mettre tout le monde au même niveau, pour remercier chacun de la même façon, pour dire qu’à nos yeux, tous ont fait, par leur combat contre le nazisme, triompher les principes d’Egalité que prônent ensemble la Révolution et la République.
Nous ne sommes pas ici par hasard. Au haut de ce monument figurent deux mots. « Patrie » et « Paix ».
Patrie. Nous sommes venus ici pour rendre hommage aux combattants qui ont permis de faire retourner notre patrie sur son sol après quatre années durant lesquelles elle en avait été chassée par la force des assaillants et par la lâcheté des collaborateurs.
Paix. Nous sommes venus ici pour déposer, en l’honneur de ces combattants, des rameaux d’olivier, symbole de paix et symbole de l’ONU.
L’ONU, voilà encore l’une des choses que nous devons à ces combattants et à tous ceux qui, avec eux, sur tous les fronts, ont combattu le nazisme. Car à l’issue de cette guerre, tous les belligérants se sont dit : plus jamais ça. Et c’est de la victoire contre le nazisme qu’est née la déclaration universelle des droits de l’homme, qui peut être considérée comme un prolongement de l’idéal révolutionnaire humaniste. C’est de cette victoire qu’est né l’ordre international nouveau qui a servi de base pour tous les combats d’émancipation, parmi lesquels celui pour la décolonisation qui a vu des nations dominées pouvoir devenir enfin des patries, c’est à dire des pays dans lesquels les peuples exercent librement leur souveraineté.
Paix universelle, liberté pour tous, autodétermination pour les peuples, répartition des richesses : les promesses de 1945 ont vite été oubliées par les dominants du monde. Pourtant elles continuent aujourd’hui de résonner comme un appel à l’union des peuples contre les oligarques qui leur volent partout la démocratie. L’élan qui a poussé les révolutionnaires d’il y a deux siècles, celui des Résistants celui de l’ armée du débarquement de Provence est le même qui pousse aujourd’hui la résistance des Kurdes contre l’islamisme en Syrie, la révolution algérienne, les manifestations à Hong-Kong ou les Gilets Jaunes en France.
Il faut donc faire vivre la solidarité avec tout ceux qui, partout dans le monde, se battent pour la liberté et la souveraineté populaire. Solidarité morale, bien sûr, mais aussi matérielle. Ce pourrait être le rôle d’une institution républicaine comme la commune d’organiser cette solidarité. Notre ville pourrait en prendre sa part : ce serait la meilleure manière d’honorer nos parents morts dans la lutte contre le nazisme.
« Patrie », « Paix ». On pourrait penser que ces deux mots ne vont pas ensemble. Qu’ils se contredisent. Que dès lors qu’il existera entre les peuples des divisions qu’on appelle « pays », « Etats », « patrie » ou « nation », alors il subsistera en germe les possibilité d’une guerre entre eux.
Je ne le crois pas. Tout au contraire. Jaurès disait : « Un peu d’internationalisme éloigne de la patrie. Beaucoup y ramène ». Une manière de dire que l’internationalisme n’est possible que dès lors qu’il existe des nations, c’est à dire des peuples qui exercent leur souveraineté et choisissent librement de leur avenir.
C’est la raison pour laquelle a été construite l’ONU : organiser le dialogue entre les nations, permettre que le monde soit ordonné par ce dialogue. Et donc en paix. Bien sûr, ce système est imparfait. Mais c’est le seul que nous ayons. Et nous le devons à tous ceux qui ont lutté contre le nazisme.
Parmi eux étaient les combattants de la Ière armée. J’ai dit qui ils étaient. Ma génération vit avec la génération de leurs petits- et arrière-petits-enfants. Depuis la Seconde Guerre Mondiale, qui faisait combattre nos anciens ensemble pour la France, une autre guerre a pu les séparer.
Des décennies après ces guerres, nous sommes venus ici déposer des rameaux d’olivier, cet arbre qui pousse sur les deux rives de la Méditerranée. Pour rendre hommage aux combattants de la Libération. Et pour rappeler que leur idéal, une fois la guerre finie, était d’aboutir à la paix et à la concorde entre les peuples, dans la Liberté, l’Egalité et la Fraternité. Puissions-nous nous en souvenir et être dignes de leur combat.